Bref, Je Voterai pour Sarkozy

Publié le par Steve Lionel

STEVE LIONEL1789 : La révolution française, évènement emblématique de l’Histoire de France.  Le 28 Août de la même année se tient dans la salle de l'hôtel des Menus Plaisirs du château de Versailles, une réunion des députés dans le but de trancher la question du poids de l'autorité royale face au pouvoir de l'assemblée vis-à-vis des lois votées par l’Assemblée.


Les places d’honneur, traditionnellement situées à droite du président, sont occupées ce jour là par les députés partisans du veto royal, majoritairement issus de l'aristocratie et du clergé. Les opposants à ce veto sont eux, assis à sa gauche, sous l’étiquette de «patriotes» : le clivage entre dans l’Histoire. Il faut cependant attendre 1830, sous la Troisième République, pour que soit institutionnalisée la différenciation politique entre gauche et droite.

Entre la fin du XVIIIe siècle et le début du XXe siècle, ces constructions vont évoluer. Les partis de gauche vont généralement se rassembler dans la promotion d'idéaux progressistes et d'égalité, la critique de l'ordre social et la volonté de réformer celui-ci dans un sens égalitaire et rationnel. On y retrouvera la social-démocratie, le radicalisme, le socialisme, le communisme et l'anarchisme.

En face, la droite va regrouper des courants politiques ayant une doctrine, une tradition ou une idéologie plutôt conservatrice, économiquement libérale ou non. La droite manifestera un certain attachement à l'ordre, considéré comme juste ou comme un moindre mal, et réprouvera les changements brusques, notamment sur les questions de société, d’éthique et économiques (droite conservatrice, par opposition à droite libérale).

On verra enfin, au fil du temps, de la Troisième, à la Quatrième puis à la Cinquième République, ce clivage se réduire et les différences s’estomper, jusqu’à l’émergence du Centre, à la croisée de ces chemins. On parle aujourd’hui en France :

  • De l’extrême gauche, que je qualifierai de gauche traditionnelle, teintée de trotskisme et de communisme avec Le Nouveau Parti Anticapitaliste, Lutte Ouvrière, Le Front de Gauche [1] ou encore Solidarité et Progrès [2] et Europe Ecologie Les Verts (EELV);
    De la gauche, avec essentiellement le Parti Socialiste (PS);
  • Du centre gauche avec Le Parti Radical de gauche, voire le Mouvement Démocrate (MODEM) dont l’essentiel des cadres actuels et l’électorat est de cette mouvance ;
  • Du centre droit avec Le Nouveau Centre (NC) ;
  • De la droite, avec l’Union pour un Mouvement Populaire (UMP) ;
  • De l’extrême droite avec le Front National (FN) et Debout La République.

Ce long voyage dans les méandres de l’histoire de France s’avère utile car  en cette période électorale, comprendre l’échiquier politique est fondamental pour l’électeur ou l’observateur qui désirent identifier de manière réfléchie le candidat dont le programme correspond le mieux aux valeurs qu’ils affectionnent ainsi qu’aux intérêts qu’ils  entend défendre.

Les sondages annonçaient depuis des mois un duel François Hollande – Nicolas Sarkozy au second tour. Les résultats officiels  du premier tour de l’élection présidentielle de 2012 ont entériné ce pronostic.

Il ne s’agit aucunement ici d’émettre des commentaires, ou de dresser une analyse des résultats[3]du premier tour de cette élection présidentielle, bien qu’elle abonde d’enseignements. L’exercice consiste plutôt à revenir de manière concise sur les programmes, les idées ainsi que les valeurs des principaux protagonistes. En faisant fi des clichés - justifiés ou pas - que nous avons de chacun de leurs personnages.

En tant que citoyen africain résidant en France, mon regard s’inclinera particulièrement sur les propositions des candidats en matière d’une part de politique intérieure pour les immigrés  et les français d’origine étrangère; et d’autre part de politique extérieure vis-à-vis du continent africain, dite à raison « politique africaine de la France ».

L’extrême gauche tout d’abord. En dépit de son faible poids électoral, elle est sans conteste la plus ambitieuse sur les questions qui nous intéressent. On retrouve [ainsi] en effet de manière récurrente dans leurs programmes les propositions telles que la régularisation des sans-papiers ; le droit de vote à toutes les élections pour les résidents étrangers ; la facilitation de la procédure de naturalisation ; l’affirmation du besoin de politiques étrangères non-violentes (boycott, sanctions commerciales…) sur les politiques militaires offensives ; la dénonciation de la françafrique ou encore la suppression des dettes des pays pauvres.

Toutefois, si sur ces sujets on peut unanimement saluer l’audace des propositions, c’est en général sur le mur des questions économiques et sociétales que se brisent les ambitions des candidats. Parmi les sujets très sensibles et défendus avec force par l’extrême gauche on retrouve en effet le droit à l’avortement aux frais de la Sécurité Sociale, le droit au mariage et à l’adoption pour les couples homosexuels, ou encore des tranches d’imposition de 75 ou même 100%[4]. Des propositions au passage reprises par le candidat du PS François Hollande.

Ensuite, histoire de bien saisir le clivage, passons à l’extrême droite. Si un nombre important d’électeurs français a hésité entre Front de Gauche et Front National en 2012, sur les questions d’immigration et de sécurité, extrême gauche et extrême droite sont aux antipodes. Autant, Nicolas Dupont-Aignan[5]propose tout bonnement d’aider les pays d’émigration africains tout en combattant l’immigration clandestine, autant Marine Le Pen est nettementplus prolixe sur ces questions. Elle ne propose d’ailleurs pas moins de 14 mesures dans le volet « Immigration » de son programme[6](le plus fourni de tous), dont principalement :

  • La préférence nationale pour l'embauche, l'attribution des logements sociaux et les aides sociales ;
  • La suppression du droit du sol, de la bi-nationalité, du regroupement familial ainsi que le durcissement des conditions de naturalisation ;
  • La réduction en 5 ans de l'immigration légale de 200 000 entrées à 10 000 entrées ;
  • Durée de la carte de résident  réduite de 10 à 3 ans avec un strict contrôle des conditions d'obtention.


On comprend mieux l’affection toute particulière que la diaspora africaine et la France « d’origine étrangère » a pour la candidate et ses soutiens.

Passons à présent à une droite a priori plus modérée représentée par  l’UMP. Il est indéniable que le souvenir du discours de Dakar[7]sur les petits africains incapables de laisser une trace dans l’Histoire, les ingérences dans les conflits africains, les incohérences d’une occulte diplomatie africaine où les émissaires officieux sont privilégiés et enfin la persécution organisée en France contre l’élite africaine au travers de la circulaire Guéant sont autant de signes qui sèment le doute quant au positionnement actuel de l’UMP « Sarkozyste » sur l’échiquier politique. Ceci étant, gageons que ces évènements sont de grossiers amalgames, des réponses appropriées à des problèmes réels (chômage en hausse, chefs d’Etats africains adeptes des réseaux parallèles) et concentrons nous sur le « Sarkozy Nouveau ».

Le programme 2012 du candidat UMP prévoit peu de choses dans les volets « Immigration » et « Intégration ». On y voit :

  • Le droit de vote réservé aux citoyens français ou européens, (par opposition aux propositions de la gauche) ;
  • Le durcissement des conditions du regroupement familial ;
  • La délivrance de visas et de l’aide au développement conditionnées en fonction des efforts de coopération des pays d'origine pour le retour des immigrés illégaux ;
  • Réduire de moitié l'immigration, en passant de 180000 droits de séjour par an à environ 90000 ;
  • Imposer une condition de résidence de 10 ans pour l'accès d'un étranger au RSA.


S’il est vrai que ces propositions sont relativement modérées et compréhensibles, elles s’inscrivent toutefois dans une logique de réduction des droits et privilèges des ressortissants étrangers résidant en France depuis 2007. On a ainsi pu observer en 5 ans la suppression des bourses Erasmus pour les étrangers non communautaires, les fulgurantes inflations sur les timbres et taxes liés aux titres de séjour et les attaques en règle contre les étudiants étrangers. Une progression pas avantageuse à relativiser toutefois au regard du contexte économique de la France et des politiques menées par les pays africains notamment vis-à-vis des étrangers résidant sur leurs sols.

Pour finir, intéressons nous au favori de cette élection, celui qui est bien parti pour prendre ses fonctions de 24è président de la République française en Mai prochain : François Hollande.

En matière d’immigration, d’intégration et de politique étrangère, la teneur de ses propositions est surprenante car aucune proposition sérieuse ou nouvelle n’apparait, exception faite du droit de vote des étrangers aux élections locales. On y lit :

  • La lutte contre l'immigration illégale et le travail clandestin ;
  • La codification précise des procédures de contrôle pour éviter le "délit de faciès" ;
  • La suppression de toute discrimination à l'embauche et au logement ;
  • Le développement des relations entre la France et les pays du Sud de la Méditerranée ;
  • La rupture définitive avec la "Françafrique", au profit d'une relation fondée sur l'égalité, la confiance et la solidarité.


Si peu d’intérêt pour ces questions indique deux  choses mutuellement exclusives : soit ces questions feront l’objet de mesures dévoilées durant le mandat présidentiel et dans ce cas, François Hollande troquerait son costume de « Flamby » contre « croque-mitaine ». Soit il ne juge pas nécessaire de modifier le système actuel, le trouvant acceptable et efficace. Ce qui semble être le cas pour une bonne partie des mesures prises sous le mandat de Nicolas Sarkozy, exceptions faites de la réforme des retraites et de la loi Guéant, qu’il a prévu de revoir sans toutefois les supprimer.

A quoi aurions-nous donc droit si le changement avait lieu maintenant[9] ? 5 années sans voir les étudiants défiler dans les rues de Paris histoire de refaire la « fashion week » version afro ? 5 années sans être à la Une de l’actualité pour chaque querelle de basse cour résolue par le président français ? 5 années d’oubli ? Je ne puis m’y résoudre, et je sais d’expérience Mitterandienne que l’eau calme renferme souvent bien des coups tordus et de sournoiserie. Aussi, je fais le choix d’une politique plus audacieuse et participative. J’ai appris d’un professeur en Stratégie que la crise engendrait le génie. Puisque je tiens à voir des génies se lever dans la diaspora africaine, ma décision est prise : je voterai Sarkozy.


Steve Lionel,
Avril 2012


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[1] coalition de partis de la gauche antilibérale réunissant le Parti communiste français (PCF), le Parti de gauche (PG), la Gauche unitaire, République et socialisme, Convergences et alternative, le Parti communiste des ouvriers de France et la Fédération pour une alternative sociale et écologique (FASE)

[2] Mouvement politique créé par Jacques Cheminade et inspiré par l'économiste américain Lyndon LaRouche

[3] François Hollande (PS) 28,6 %, Nicolas Sarkozy (UMP) 27,1 %, Marine Le Pen (FN) 17,9 %. Taux d’abstention de 20,5 %

[4] Taux marginal porté à 100% au dessus d’un revenu de 260.000 €/an pour le NPA et 360.000€/an pour le Front de Gauche

[5] Dirigeant du parti républicain et gaulliste Debout la République

[6] http://www.frontnational.com/le-projet-de-marine-le-pen/autorite-de-letat/immigration/

[7] http://tempsreel.nouvelobs.com/politique/20090407.OBS2391/le-discours-de-nicolas-sarkozy-a-dakar.html

[8] Personnage maléfique dont on parle aux enfants pour leur faire peut les rendre plus sages

[9] Allusion au slogan de campagne de François Hollande « Le changement c’est maintenant »

Publié dans Politique

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W
Salut Steve,<br /> Perso j'ai bien compris ta conclusion et je trouve toujours que l'article a été bien mené et que ton choix pour Sarkozy peut se défendre; après tout tu es libre de penser et voter pour qui tu veux<br /> (si tu pouvais biensur lol)<br /> Néanmoins, au vu du bilan de NS (comme tu l'appelles très familièrement), je n'aurais pas voté pour lui simplement parce qu'il est un grossier menteur et que son quinquennat n'a fait que diviser et<br /> appauvrir les Français... Les gens ne vont pas dans la rue pour le plaisir d'être vu et reconnus comme des esprits éveillés, mais parce que la faim (ou fin) les guette... ;)
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S
Plusieurs d'entre vous semblent être choqués par ma conclusion. Je tiens à préciser que:<br /> - Lorsque je dis "5 années sans voir les étudiants défiler dans les rues de Paris histoire de refaire la « fashion week » version afro ?", je fais référence avec ironie à toutes les manifestations<br /> que les politiques de Messieurs Hortefeux et Guéant ont engendrées;<br /> - Lorsque je dis "5 années sans être à la Une de l’actualité pour chaque querelle de basse cour résolue par le président français", je fais référence à l'ingérence permanente de Nicolas Sarkozy<br /> dans les affaires politiques africaines, ce que l'on appelle françafrique. Un bel exemple a été l'injonction faite par NS à Laurent Gbagbo de quitter le pouvoir avant même que le Conseil<br /> Constitionnel de ce pays n'ait proclamé les résultats;<br /> - Lorsque je dis "5 années d’oubli", je fais ironiquement référence au fait que ces 5 dernières années ont sans cesse mis la lumière sur les étrangers et les immigrés, et ont fait d'eux des<br /> stars.<br /> <br /> J'espère que le ton de ma conclusion sera plus facile à identifier à présent.
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E
Uriel je suis absolument d'accord avec toi mais je pense si je ne me trompe pas qu'il s'agit là de la politique intérieure? Les immigrés légaux qui résident en France ont donc des droits comme des<br /> devoirs. Moi je parlais de l'immigration en terme d'entrée sur le territoire français d'étrangers. Je pense, selon mon humble avis, que c'est aux français d'en décider, de choisir de maintenir ou<br /> de réduire le nombre d'entrées (comme dans tous les pays). Après c'est sûr que concernant les droits des immigrés légaux en France on aurait pas mal à revendiquer.
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U
Penses tu que nous avons moins notre mot à dire par rapport à la politique de ce pays, dans lequel nous vivons, nous contribuons à la croissance, cotisons à la retraite des plus vieux, nous sommes<br /> directement impact et par les politiques d'urbanisation mise en place par les maires, nous développons les commerces et je pourrais encore ajouter une dizaine de lignes semblables. Au même titre<br /> que nous avons des devoirs, nous avons mériter nos droits.
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E
Moi j'en dis que si la proposition de FH concernant la rupture définitive de la françafrique était respectée, ce serait déjà très bien. Quant à la politique d'immigration en France elle concerne<br /> les français et ce sont eux qui en décident.
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